jeudi 12 mars 2015

La petite fille qui rêvait de devenir une grande cavalière...


Itinéraire d'une enfant pas sage


Dans ma vie, j'ai déjà fait des choses incroyables. J'ai eu, à une certaine période de ma vie, une verve et un culot insolent qui m'ont ouvert des opportunités improbables. J'ai réalisé des rêves que je n'avais même pas encore formulés.

Piloter un ULM, faire de la voltige aérienne, descendre un barrage hydroélectrique en rappel, conduire un énorme tracteur, voir une éclipse totale de Soleil, donner des conférences d'astrophysique, remporter des prix artistiques...


Bref, un début de vie bien rempli. Et puis, la verve s'est calmée et le culot a disparu avec la personne qui avait su insuffler en moi cette confiance sans faille.


Un rêve réalisé depuis peu : celui d'écrire un livre et de le voir édité.


Il me reste pas mal de rêves en réserve, mais il y en a un qui me glisse régulièrement entre les mains. Mais les rêves qui nous échappent sont ceux qui nous font avancer, semble-t-il...


Rêve de centaure


Il y a des « passions » qui nous tiennent quelques années, puis on a fait le tour du sujet et l'on s'en éloigne... les chevaux, ça ne m'est jamais passé.


D'aussi loin que je m'en souvienne, ça remonte à toute petite. Ma première promenade à cheval, je l'ai faite au cirque de Gavarnie dans les Pyrénées, j'avais 3 ans et il paraît que je ne voulais plus descendre. J'ai attrapé le virus et il ne m'a plus quittée.


Quand mes amies voulaient faire de la danse ou de la gymnastique, moi je voulais faire du poney.


Mon rêve était de devenir un de ces grands cavaliers que je regardais avec plaisir et envie sur les magazines et sur les vidéos des compétitions que ma grand-mère m'enregistrait sur le câble.


Quand j'ai commencé l'équitation à 6 ans, tout se passait pour le mieux : j'apprenais vite et bien, j'avais un bon feeling avec les poneys. Pour raisons familiales, j'ai dû attendre d'avoir 13 ans pour retrouver mon centre équestre et cette fois-ci les chevaux. Encore une fois, la progression était là. J'étais curieuse et appliquée, ma « carrière » de cavalière était bien engagée. J'ai alors décidé de poursuivre mes études dans un lycée agricole pour embrasser une filière de production animale avec option « cheval », je voulais monter un élevage, je m'intéressais beaucoup à la génétique. Quelques quiproquos plus tard, me voici en filière environnementale, mais avec un centre équestre au sein même du lycée. Les choses ont alors commencé à se gâter. La progression n'était plus là, malgré les 3 h d'équitation par semaine.


Ne pas progresser au même rythme que les autres cavaliers de ma reprise m'a toujours beaucoup frustrée. Pourtant j'y mettais du cœur et je me suis intéressée très tôt à la technique, à la biomécanique et l'éthologie alors qu'on en parlait encore à peine. Je voulais être imbattable sur la théorie, connaître les chevaux pour les comprendre. Nous étions un groupe dynamique de cavaliers dans ma classe, avec un esprit de compétition acéré, et je cherchais tous azimuts des méthodes pour m'améliorer, mais sans résultats. Le constat était là : trop raide à cheval, pas suffisamment d'indépendance des aides et une conception de l'assiette trop « personnelle », qui si elle me permet de tenir à cheval dans à peu près toutes les situations ne fait pas de moi une virtuose... Pourtant, j'ai mangé sans broncher des heures et des heures de mise en selle et de poussière dans le manège. Bref, j'ai fini par me résigner à avoir un seul objectif : ne pas gêner ma monture. Après plusieurs crises douloureuses, un médecin m'a interdit de monter à cheval à cause d'une hanche instable : j'ai tout arrêté, la mort dans l'âme, et j'ai laissé mes études s'éloigner des chevaux.


Mais j'avais ça dans le sang, je bouillais intérieurement dès que je voyais un cheval dans un pré, je ne pouvais plus regarder d'équitation à la télévision... C'était infernal, il fallait que j'aie de nouveau des contacts avec les chevaux !


J'ai donc repris épisodiquement après plusieurs années d'interruption, en club, en promenades sur des sites touristiques. Mais ce n'était pas ce que je cherchais. Je voulais du contact, pouvoir rester des heures avec les chevaux, les observer.


J'ai trouvé ma première demi-pension, puis une autre. J'ai pris de l'expérience, j'ai géré des « drames » et de gros bobos de pré, je partais seule, je me sentais prête à passer à l'étape suivante. Et un beau jour, une occasion qui ne se présente pas deux fois, j'ai trouvé ma perle rare : Kely, une jument haflinger que l'on m'a confiée.


Quand le rêve vire au cauchemar


Après quelques mois à chercher la pension idéale, puis à organiser le transport, me voilà avec mon « presque cheval à moi ». Pleine de doutes : vais-je y arriver ? Et la question avait toute sa raison d'être : ma santé venait de me lâcher une nouvelle fois peu de temps avant... un avertissement dont je ne voulais pas tenir compte. Le répit fut de courte durée, et ce fût le « drame ». Non seulement je ne progressais plus, mais je régressais. J'ai perdu confiance en moi, et mes relations avec les chevaux se sont détériorées, surtout avec ma jument. Je n'allais pas bien : elle était infernale. Je n'en faisais plus rien, même la panser devenait dangereux. C'était l'incompréhension. La personne qui s'occupait d'elle chaque jour n'avait aucun problème avec elle. Ce qui était d'autant plus frustrant : je devais vraiment être nulle pour arriver à un résultat pareil.


J'étais arrivée à un stade où je songeais même à me séparer d'elle et à laisser définitivement l'équitation derrière moi, car visiblement je n'étais pas taillée pour ça.


Une grosse remise en question, douloureuse. J'avais construit tant de rêves autour des chevaux, tant respiré et vécu cheval, que j'avais l'impression qu'une partie de ma vie n'avais plus aucun sens. Je venais de réaliser le rêve ultime après des années d'attente : celui d'avoir l'entière responsabilité d'un cheval, et je n'étais absolument pas à la hauteur, je n'y prenais aucun plaisir, j'étais en pleins doutes.


Ironie du sort, mon livre a choisi ce moment-là pour trouver éditeur et être édité ! Autant dire que l'esprit n'était pas à la promotion, d'autant plus qu'il fallait invariablement parler de ce dont je n'avais pas envie de parler : de cheval !



Le bout du tunnel


Je savais ma jument entre de bonnes mains dans sa pension, j'ai pris du recul et j'ai pris le temps de m'occuper des problèmes de santé qui me collaient à la peau depuis si longtemps. Et c'est alors que j'ai su que je n'étais pas une mauvaise cavalière. Ce fut un immense soulagement.


Ma stagnation puis ma régression étaient dues à une maladie qui me prive de ma proprioception. Je ne sens pas bien, voire pas du tout, mes jambes et le reste de mon corps, ce qui n'aide pas quand on est à cheval.


Ça ne m'a pas consolée, car si je sais que je ne serais jamais la cavalière que j'aurais aimé être avec seulement des coups de pied aux fesses, je sais qu'il ne me manque pas grand chose pour y parvenir.


Le rêve se poursuit


J'aimerais devenir cette « grande » cavalière. Bon à quelques détails près, j'y suis presque... Du matériel adapté, une monture adaptée, une structure et un coach, et c'est parti !


Bon, c'est vrai, ce sont plutôt de très gros détails.

Mais en rêve, tout est permis, et parfois les opportunités frappent à votre porte !



Petit souvenir de 2nd, j'avais des potes sympas quand même !